guingant-convert


Gaëlle Guingant-Convert (1971-)


Céramiste, sculpteur à Salies de Béarn (Pyrénées-Atlantiques)
Gaelle Guingant-Convert

Tout ‘Droit’, un chemin de terre. 
Née en 1971 à Paris, Gaëlle Guingant-Convert baigne depuis son enfance dans l’artisanat d’art (ses parents travaillaient le métal pour la création de bijoux et de miroirs). Début des années 80, la famille quitte la capitale pour les Landes. Baccalauréat en poche, la jeune femme entreprend des études de Droit à la faculté de Bayonne, mais rapidement elle s’ennuie dans les codes et les textes de lois, rébarbatifs et trop contraignants.
C’est fortuitement qu’elle découvre la terre et commence à modeler. Afin d’acquérir quelques rudiments, elle étudie le dessin modelage d’après modèle vivant à l’école de dessin de Bayonne, puis elle fait un stage de tournage chez Yvan Gaudi, un potier local. 
En 2004, avec volonté et déterminisme, elle franchit le pas et crée son propre atelier de céramique. 

Jour après jour, en solitaire, elle travaille sur, avec et contre cette terre : « Expérimentations ratées, mauvais jours, émaux capricieux ou fugueurs, cales, gestes maladroits, fragments de tessons… Il y a ces petits fragments merveilleux qui n’ont jamais trouvé leur place, ou encore ceux qui n’ont jamais donné lieu à un développement céramique. Un atelier au final regorge de tous ces petits témoignages d’un jour. »

L’accumulation, comme un frein au temps 
Au fil du temps, Gaëlle a appris à maîtriser les techniques (modelage, colombin et tournage). Elle marie les matières (grès blancs, noirs, grès d’Orriule, chamotte, porcelaine et même le verre pilé) qu’elle cuit à 1280°C. Quelles soient brutes, engobées ou émaillées, ses pièces surprennent par leurs effets de matière, de tonalité et de contrastes.
Jusqu’en 2020, Gaëlle travaille sur la thématique de l’accumulation en jouant sur la répétition du motif sur des pièces de différentes tailles. Sensible à la nature sauvage, son adolescence est imprégnée du pouvoir bienfaisant des forêts landaises : l’alignement répétitif des pins maritimes donne l’illusion de suspendre le temps. D'une certaine manière, cette pause récréative lui procure un sentiment d’apaisement. 
Cette vision de lignes serrées est revisitée par Gaelle dans son travail sculptural : « Chaque pièce résulte d’une volonté de prendre le temps, de ralentir en répétant inlassablement les gestes premiers et communs d’un art séculaire, j’essaie de donner un sens dans un monde où la vitesse domine ». « Cette répétition, c’est la notion du temps. C’est aussi une attitude dans le travail qui permet à l’esprit de vagabonder ». 
Vagabonder dans le jardin imaginaire de Gaëlle, c’est aller à la rencontre des ‘carbones’, des ‘spores’, des ’jarres de trame’, de passages’, … et bien d’autres hybrides chimériques. C’est écouter d’étranges fossiles en terre, dont le squelette témoigne des prouesses architecturales d’une ‘Dame Nature’.
Gaelle Guingant-Convert
Les ‘Trames’ (colonnes grimpantes) font écho à la fois à la structure des loofas (genre d’éponge végétale en forme de concombre géant) et à la construction des fourmilières africaines, qui grimpent vers le  ciel. 
Au contraire, rampantes au sol, les 'spores' pourraient invoquer un rêve de pluie. Le monde de la céramiste est en marche douce avec les 'sponges' (en grès, verre et éponge) et des hybridations abstraites. 
Gaelle Guingant-Convert
A travers son œuvre, au-delà de l’évocation d’un processus de croissance, du cycle de la vie et de la fuite du temps, Gaëlle propose sa propre genèse. Son cheminement artistique l’amène tout naturellement à sortir du microcosme pour explorer des organismes plus complexes comme les batraciens et les mammifères.

De la beauté de la boue au bestiaire allégorique
Fidèle à son attachement à la nature, Gaëlle Guingant-Convert aborde une sculpture animalière d’une vérité qui interpelle le surnaturel.

Au bord d’un étang, git un crapaud à peau grumeleuse qui paresse les pieds dans la vase, son voisin à l’œil vif s’enorgueillit de son manteau gluant de pustules et quand viennent les fêtes bacchanales, des audacieux s’agrippent entre eux …
Dans ce bestiaire fabuleux pétrifié de surprise et de malice, Gaëlle révèle la beauté singulière de la nature. 

Inutile d’attendre le baiser d’une belle pour lever le sortilège et transformer le batracien en prince charmant ! Ici, dans la ‘mare au diable’, le charme opère ! Au-delà de toute apparence, le vrai est beau et suspend le temps comme par enchantement.
« Courez lièvres, renards, corbeaux et ours bruns, car ce soir, vous êtes attendus dans les marécages !» …. 
Gaelle Guingant-Convert
Gaelle Guingant-Convert
Gaelle Guingant-Convert
Gaelle Guingant-Convert
Dotées d’un réalisme spontané, les sculptures de Gaëlle Guigant-Convert procurent l'effet  de se conter des histoires, comme le font les enfants.
Gaelle Guingant-Convert
Dans le travail de la terre, point de magie, mais une observation de l’animal dans son environnement et une recherche approfondie de son anatomie pour réaliser des dessins préparatoires. Les créations sont modelées en grès de différentes couleurs : « C’est un travail représentatif mais non naturaliste. Je m’accorde une certaine liberté dans la représentation des animaux, préférant avant tout me concentrer sur les effets de texture de surface et de mouvement » 
Gaelle Guingant-Convert
Une liberté teintée d’un humour subtile qui reflète la personnalité joyeuse et sensible de l’artiste ! 
Gaelle Guingant-Convert
Gaelle Guingant-Convert
Gaelle Guingant-Convert

Ne ratez pas sa version ironique de la fable ‘le cochon, la chèvre et le mouton’, mettant en scène la danse frénétique des trois animaux anthropomorphes : un bestiaire délicieux digne de jouer dans ‘La ferme des animaux’ de George Orwell
Je remercie Gaëlle Guingant-Convert pour son sympathique entretien et pour le partage des photographies.

Texte © Christine Lavenu 01/10/2024, photographies © Christine Lavenu 
Conformément à l’article L122-5 du Code de propriété intellectuelle, la personne qui reproduit, copie ou publie le contenu protégé doit citer l’auteur et sa source.

Sources, pour voir et en savoir plus : 
Entretien avec Gaëlle Guingant-Convert au jardin de Malrigou, juin 2024
Revue Ateliers d’Art 2010, numéro 85 
Revue de la céramique et du verre, numéro 191, septembre-octobre 2013
Revue de la céramique et du verre, numéro 157, novembre-décembre 2007

Share by: